Interview Peter Sickman

C'est en allant surfer sur le site de l'éditeur indépendant TOP SHELF (le
plus européen des éditeurs US) que j'ai découvert Peter Sickman-Garner.
Top Shelf propose en effet des packs promos découvertes regroupant pour une modique somme quelques uns des fleurons de leur écurie, et c'est en commandant l'un deux, comprenant une poignée de graphic novels de qualité (*) et deux exemplaires de Top Shelf : le fanzine, que je suis tombé sur Hey Mister !

Hey Mister ! est le nom de la série fétiche de Peter Sickman et aussi celui d'un des trois personnages principaux de ces histoires, avec Young Tim et Aunt Mary. Dans «The Trouble with jesus» qui raconte les difficultés d'adaptation sociale de Aunt Mary, l'adolescente maniaco-psychopate et ses relations avec ses collègues et son patron. Le thème des sectes et des gourous est abordé dans un style punk à l'humour noir dévastateur. On rigole franchement en grinçant des dents.

Le recueil «Hey Mister ! the celebrity roast» (« le rôti de célébrités ») regroupe quant à lui 25 petites histoires mettant en scène nos 3 anti-héros. Dans leurs galères, leurs turpitudes comme leurs actes de désespoir ou de foi (lorsqu'il leur arrive d'en avoir). L'imagination est à son comble lorsque Sting lui-même se trouve impliqué dans un épisode (mais comme petit four dans une soirée). (!!...)

Avec ce ton franchement jeune, insolent, dur parfois., marrant tous le temps, et sacrément original (on pense à cette génération South Park ou Bevis & Butthead) et un dessin plutôt sympa, on se dit que «Hey Mister» ne saurait rester longtemps intraduit de ce coté ci de l’'Atlantique. (hou hou Cornelius !); ou alors il va falloir s'y atteler !

D'ici là, présentation de l'auteur, Mister Sickman himself :

Franck : D'ou viens-tu et comment as-tu débuté dans ce travail ?

Pete : Je suppose que tu me parles de mon travail de dessinateur, parceque j'ai actuellement un travail à temps plein (dans une librairie universitaire) qui m'aide d'ailleurs beaucoup plus que les comics peuvent le faire.
J'ai grandi dans une ville etudiante en Pennsylvanie. Comme la plupart des enfants j'ai pas mal gribouillé et je recopiais des personnages de mes comics préférés (surtout les Peanuts et Doonesbury). Je n'ai jamais lu de comicbooks étant gosse. A coté de mes bandes préférées j'aimais beaucoup lire les dessins politiques. Ma première ambition dans le domaine du dessin fût de faire un strip quotidien, mais plus je vieillissais, plus ça me semblait un format limitatif. De plus à assez peu d'exceptions près, les strips des journaux sont souvent assez horribles. La plupart sont ininspirés et pas drôles pour un sou, ce qui me rendait coléreux à leur lecture. Et le niveau d'auto-censure dans ce milieu ne m'aurait jamais satisfait de toutes façons. Du coup je me suis lancé dans la bande dessinée politique mais mes premiers efforts furent plutôt mauvais. Ils souffraient de quelque chose avec lequel je me bats toujours actuellement lorsque j'essaie d'être dans l'actualité avec «Hey Mister», ce qui fait que j'essaie d'être entre la satire et le prêche ou le prosélitisme.

Je travaillais dans une librairie à Madison, dans le Visconsin lorsqu'un copain me proposa un paquet de BD d'occasio pour $10.00. J'ai eu plein de numéros de Eightball, Hate, Love and Rockets, Drawn and Quaterly. J'avais abandonné l'idée de faire mes propres bd, mais le fait de lire tout cela m'a montré le genre de Bd à laquelle je n'avais jamais été exposé. (je ne veux pas dire que c'étaient des pionnières en la matière, ça montre plutôt combien inculte j'étais). Aussi, un soir vers Noêl en 1990 j'ai décidé que je serai un cartoonist et que je réaliserai mes propres bandes.
Pas la peine de préciser que je n'ai pratiquement rien fait durant les trois années qui suivirent. A peine un total de 3 histoires (20 pages). Mais je me suis mis quand même en tête (sans grande garantie) d'être un cartoonist et ça m'a aidé lorsque je me suis mis réellement au boulot. Je pense qu'un petit regain de foi en soi est important lorsque l'on se lance dans une activité créative.
En 1993, à la même boutique où j'avais acheté les bd, j'appris d'un étudiant que le journal du collège recherchait des personnes pour dessiner des strips. Je n'étais pas allé trés loin en longueur dans mes histoires et je me suis dit que des délais fixes me mettraient un peu de pêche, donc j'envoyais mes essais et ils furent acceptés.

Je dessinais quatre planches de strips pour l'année et demi qui suivit où je développais les personnages qui apparaitraient dans «Hey Mister». Cela commenca avec Mister, qui était plus ou moins basé sur un ancien co- locataire qui imitait assez bien Hunter S.Thompson (souvent aux moments les mois appropriés d'ailleurs). Comme c'était un journal étudiant, je voulais un personnage de type étudiant alors je créais Young Tim, avec son style ringard, lourd et repoussant de petit riche, et Aunt Mary dans le rôle de la personne qui déteste les ptits mecs riches, ringards, lourds et repoussant.Lorsque je fus fatigué de faire le strip, j'utilisais mes nouvelles habitudes de dessinateur pour produire d'autres histoires et faire un minicomic de 16 pages. Je sollicitais le maintenant défunt Capital City Comics qui, à ma grande surprise l'accepta.

Franck : On sent une drôle d'ambiance dans Hey Mister. Comme quelque chose sur le fil du rasoir. Genre B-movies ou pulp fictions.

Pete : L'idée du thème est venue petit à petit. Au début tous les personnages n'étaient que des supports (sic) quel que soit le sujet que je voulais aborder ou les chutes que je voulais faire. Je pensais à des situations en premier et mettait ensuite les personnages dans les rôles les plus appropriés. Maintenant qu'ils sont mieux définis j'essaie d'écrire des histoires pour chacun.
Généralement j'aime que mes histoires aient des structures classiques. Je pense que celles-ci amplifient automatiquement quelqu'élément étrange ou obscène que j'y inclue. Aussi, si je raconte l'histoire d'un garçon avec un pénis parlant, j'essaie de raconter l'histoire aussi sérieusement que
possible. La situation est par elle-même absurde et je n'ai pas besoin de jouer dessus. Alors, une fois que l'on a admis que le pénis parlait, je continue normalement et le lecteur suit car il veut savoir la suite. Je désire placer les aspects bizzares en arrière plan, afin que le lecteur le ressente, mais pas que ceux-ci prennent le dessus de l'action. Aussi, les situations étranges que je peux établir me donnent de nombreuses opportunités humoristiques. (...)

Interview/traduction : Hector,
à suivre dans Onabok #2 (voir page commande)